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Alice arrive quand nous nous installons à table. Elle a mangé déjà et nous tient compagnie avec la timidité que ni le temps ni l’habitude ne suffisent à lever. Elle offre son sourire éclatant et se glisse de bonne grâce dans les discussions du quotidien. Nous jouons le ballet domestique gai et légèrement las du dîner d’un soir quelconque qui se dissout aussi vite qu’il s’est formé, quand chacun repart vaquer à ses occupations. La porte de la chambre se ferme et j’entends leurs rires se libérer. Elle a apporté du vin. Finalement, ils ne sortiront pas tout de suite. Il débarque dans la cuisine, cherche à haute voix les verres à pied. Je ne lui dis pas le plaisir profond qui m’envahit lorsque leurs éclats de voix me parviennent. Qu’il vive, sans manière, l’intimité complice et joyeuse avec ses amis, celle de la privauté, dans le périmètre de notre vie de famille, me saisit à l’endroit de ce que je n’ai jamais réussi à partager dans la mienne.